Conférences à l'IFC
Les idéologies totalitaires en acte et en image: 2ème partie
.
Le nazisme en acte et en image.
Le cinéma nazi : L’esthétisation de la violence
Samedi 10 février. 2018. IFC.15H
Ne nous leurrons pas le cinéma de fiction nazi fut d’abord un cinéma de divertissement, une usine à rêves cherchant à produire des bénéfices et rencontrant un vif succès populaire.
Du « Hitlerjunge Quex » au « Péril juif » certains films mettent cependant en exergue les ressorts et les mécanismes du nazisme : culte de la personnalité, embrigadement et asservissement de la jeunesse, stigmatisation de l’ennemi (juif), prélude à son anéantissement. Les grands personnages de films historiques, au contenu politique moins explicite, se veulent la préfiguration du führer-messie.
Ce sont surtout les deux documentaires de Leni Riefenstahl qui révèlent la nature profonde de ce régime fondé sur une politique de l’affect : des rassemblements océaniques de Nuremberg aux J.O de Berlin ces films, mises en scène de mises en scène, exaltent l’union mystique du Völksgemeinschaft avec son chef dans le cadre d’un Reich se voulant millénaire.
C’est bien sûr cette esthétisation de la politique qui est cœur de la liturgie nazie : tout l’art politique des nazis (Hitler, Goebbels et Speer) a été de transformer leur idéologie raciste et pangermaniste en religion politique productrice d’illusions, occultant la dimension réelle de ce système fondé sur la terreur.
La tentative de des démocraties occidentales de tourner en dérision ce spectacle de masse paraîtra bien dérisoire. (Figuéréo Ch)
Les idéologies totalitaires en acte et en image: 1ère partie
Les révolutions russes : 100 ans déjà !
Cinéma et propagande soviétique : Eisenstein réécrit l’histoire
Samedi 11 novembre 2017. IFC. 15H
Le stalinisme est d’abord une entreprise de confiscation et d’abolition de la mémoire : jamais autant on n’avait privé les Russes de leur passé et imposer des souvenirs fabriqués (« même le passé est imprévisible ! » disaient les soviétiques) : les photos détourées et retouchées en sont le parfait exemple.
Le cinéma et, d’abord celui d’Eisenstein, est au service de cette réécriture de l’Histoire : les Grands Hommes sont une préfiguration de Staline, la nation russe est exaltée dans le cadre de la Grande guerre patriotique (« Alexandre Nevski » ou « Ivan le terrible » dont l’Opritchnina incarne les forces progressistes : Staline élimine la vieille garde avec le NKVD et son chef Beria comme Ivan élimine les Boyards) et les révolutions sont célébrées, celle de 1905 avec le « Cuirassé Potemkine » et celle de 1917 avec « Octobre »
Ce dernier film a été critiqué et a eu un accueil mitigé. Il apparait comme un entrelacs de symboles jugés difficilement interprétables pour le prolétariat peu habitué à ce « montage trop intellectuel »
L’ultime scène est une apothéose mais ce combat épique est une pure invention, une tentative pour donner à la Russie sa propre prise de la Bastille et de faire de la révolution bolchévique un mythe fondateur du XXème s.
En réalité selon Trotski « l’acte final de notre révolution paraît trop bref, trop sec, trop manouvrier. Où est l’insurrection ? On ne trouve qu’une série de petites opérations, calculées et préparées à l’avance. Il n’y a pas d’action de la part des masses. Pas d’épisode dramatique les mettant en scène. Il n’y a rien dans ces moments historiques que l’imagination a coutume d’associer à l’idée d’insurrection »
De structure différente cette fois-ci la conférence s’appuiera sur de larges extraits des films d’Eisenstein.(Figuéréo Ch)
Civilisations mystérieuses, civilisations disparues.
2ème partie
Le secret des cités mayas
Apocalypto
Mel Gibson. 2006
IFC
14 Octobre 2017
A la vision romantique d’une civilisation maya pacifique relayée par les artistes et voyageurs au XVIIIème siècle puis par les savants et photographes au siècle suivant la deuxième moitié du XXème s. apportera de cinglants démentis ; les peintures de Bonampak, le déchiffrement des glyphes révèlent des cités belliqueuses pratiquant des sacrifices humains et dont les rois garantissent, par une série de rites (dont l’automutilation) le bon fonctionnement de l’ordre cosmique.
On se perd en conjectures sur l’effondrement des cités mayas des Basses- Terres à la fin du premier millénaire : dépenses somptuaires d’une politique édilitaire ruineuse, compétition permanente entre rois, guerres perpétuelles entre cités rivales, surpopulation, catastrophes naturelles se sont sans doute mêlées. Le coup mortel des conquistadors aura raison des cités du Yucatan au XVIème s.
La perception d’un temps cyclique révélée par les calendriers, les prédictions présentes dans les 3 codex ont également nourri l’imagination sur une illusoire croyance en la fin du monde.
Ce sont ces sources d’interrogations qui nourrissent le film de Mel Gibson, à l’historicité contestée (malgré la présence du maya yucatèque) et dont la violence terrible est au service d’une mise en scène spectaculaire.(Figuéréo Ch.)
Civilisations mystérieuses, civilisations disparues.
Les mystères des l’île de Pâques
Rapa-Nui
Kevin Reynolds. 1994
23 Septembre 2017
IFC 15H
Le soir du dimanche 5 avril 1722, jour de Pâques, la flotte de l’amiral Roggeveen aborde une île minuscule, aride et faiblement peuplée. Des statues monumentales, se dressant sur la côte, frappent de stupeur l’équipage.
Dans leur quête vaine et obsessionnelle d’un continent austral (Terra australis incognita) les navigateurs du XVIIIème ne pouvaient ignorer l’île polynésienne.
La légende prend corps : quelle est la signification de ces mégalithes? Comment ont-ils pu être transportés sur cette île dépourvue de bois ? Les moai déchaînent les imaginations: voyageurs et écrivains rivalisent d’explications farfelues et délirantes.
Pour les lignages rivaux qui descendent des marins émérites arrivés sur leur catamaran au terme de leur folle course transocéanique ils sont l’incarnation de leurs ancêtres déifiés.
La trame du film Rapa Nui est la fête de l’homme –oiseau (Tangata manu), où le vainqueur devenait un homme-dieu pendant une année, vérité historique quelque peu subvertie au nom d’une fable écologique. Se poser la question de l’effondrement de la société pascuane c’est effectivement aussi se poser la question de l’interaction entre dégradation environnementale, changement climatique et sociétés humaines (Jared Diamond) Question brûlante d’actualité ! (Figuéréo Ch.)
Camp de Thiaroye
Festival Image et Histoire
Les Africains se réapproprient leur histoire : l’exaltation des prémices de l’indépendance
Camp de Thiaroye de Sembène Ousmane (1988)
IFC. Samedi 19 mai à 16h30
Si le film a été jugé trop manichéen, didactique ou prenant des libertés avec une réalité historique traitée de manière trop binaire il n’en reste pas moins que son symbolisme est au service d’un violent réquisitoire contre un monde raciste et ségrégué qui n’a plus lieu d’être.
La répression a marqué de manière indélébile la mémoire sénégalaise et le film entretient la flamme du souvenir en étant en porte à faux avec une histoire écrite par les dominants.
Ce film-charge contre le racisme- et pas seulement contre une nation ingrate, « oublieuse de sa mission d’hier » (Senghor) - veut témoigner de l’éveil des consciences et s’inscrire dans la longue histoire des résistances africaines pour l’obtention de la dignité humaine (après Emitai et Ceddo et avant Guelwaar)
La seule alternative aux Africains est le rejet radical et absolu de la présence française et la décolonisation dans le cadre d’un panafricanisme assumé.
Le sergent-chef Diatta, « Pays », l’afro-américain, les officiers gaullistes et ex-vichystes constituent une galerie d’acteurs d’une page sanglante de l’histoire mais composent surtout une fresque qui confère à ce film une dimension universelle dépassant la simple tragédie coloniale.